L'évaluation au travail remise en cause


L'évaluation au travail a toujours fait polémique dans l'entreprise. Les experts, les opérationnels et les salariés sont partagés. Certains y voient une manière de gérer le personnel de façon neutre et optimale. D'autres, de plus en plus nombreux, savent les dérives, les déceptions et les méfaits provoqués chez les salariés et par extension dans l'organisation elle-même impactée toute entière. 

Le débat est connu. Les deux bords s'opposant tout autant. 

L'un souhaite capitaliser et verticaliser, sous couvert d'évaluation nominative avec son hiérarchique, l'ensemble de la masse salariale afin de la rendre sans cesse plus quantifiable jusqu'à la vider subtilement de son "humanité" au profit de priorité absolue de la productivité et des bénéfices. 

L'autre bord souhaite réconcilier la logique du profit avec la logique des dynamiques sociétale et humaine. Renaud Sainsaulieu, sociologue visionnaire et fondateur de l'APSE, l'Association des Professionnels en Sociologie de l'Entreprise, avait très tôt anticipé l'ère post-industrielle et compris combien il serait laborieux et pourtant salvateur pour toutes les parties d'installer progressivement un management plus humain et une démocratie plus participative au sein des entreprises.

Le monde du travail d'aujourd'hui semble lui donner raison.

1. La croissance stagne,
2. La masse salariale est sans cesse plus sous pression et décroche,
3. Les salariés ne sont plus du coup motivés par leur seule rémunération mais bien davantage par le sens donné à leur travail, à défaut ils en tombent malades cf burnout, absentéisme, présentéisme etc.,
4. Parce que l'entreprise fait la société, et réciproquement, le sociétal est simultanément désorienté en réagissant par réactivation de niches de populismes et désillusion amère sur le monde politique en général,
5. La démocratie participative dans l'entreprise, modérée et profondément éthique, est attendue, sans la nommer précisément ainsi, par beaucoup.

Cette perspective pourrait bien constituer la seule issue viable pour tous les acteurs. A défaut, les risques d'implosion sociale et de crevaison des bulles financières seraient majeurs. Substituer aux indicateurs de performance exclusivement quantitatifs, préformatés ou monétaires des indicateurs pérennes et plus subjectifs deviendrait du coup crucial. 

Nos sociétés muent. 

Le curseur semble se déplacer de plus en plus sûrement sur ce qu'on appelait jadis des utopies : l'inscription de nos sociétés dans la durée pour garantir notre cohésion sociale et pour préserver notre patrimoine naturel est devenue le leitmotiv du 21ème siècle.

Afin d'approfondir le thème de l'évaluation au travail, l'APSE organise une conférence-débat sur ce sujet le Jeudi 28 mai 2015 de 18h30 à 20h30 à la Faculté de théologie protestante de Paris située au 83 boulevard Arago, 75014 Paris à partir du livre "Evaluez moi ! L'évaluation au travail : les ressorts d'une fascination" de Bénédicte Vidaillet paru au Seuil en 2013, coll. Sciences humaines. 

"L’évaluation a fait l’objet de nombreuses critiques de spécialistes du travail, ses méfaits sont connus. Pourquoi alors continue-t-elle de se développer dans tous les secteurs d’activité ? Pourquoi la plupart des personnes qui travaillent soutiennent-elles des pratiques qui finissent par leur nuire ? Cet essai passionnant propose une réponse : nous voulons être évalués.

S’appuyant sur de nombreuses situations concrètes, Bénédicte Vidaillet montre que l'évaluation promet de résoudre les problématiques qui se posent à chacun de nous au travail. 

Ainsi semble-t-elle offrir une reconnaissance nécessaire à notre équilibre psychique quand l’actuelle logique de performance ne nous signifie que notre insuffisance ; ou nourrir notre motivation en proposant sans cesse de nouveaux défis ; ou évacuer la confrontation à l’autre, en remplaçant le conflit par la compétition.

Mais l’évaluation fonctionne comme un piège : loin de les résoudre, elle ne fait qu’alimenter les besoins auxquels elle prétend répondre. En montrant sur quels ressorts psychiques l’évaluation joue pour nous séduire alors qu’elle contribue grandement à détruire notre désir de travailler et notre relation à l’autre, cet essai tranchant et fouillé donne aux salariés les moyens de cesser de s’y plier.

Bénédicte Vidaillet est maître de conférences à l’université de Lille-I et psychanalyste. Ses recherches portent notamment sur la subjectivité au travail. Son précédent livre, Les Ravages de l’envie au travail (Editions d'Organisation, 2006), a reçu le prix du livre RH Sciences-Po/ Le Monde en 2007.

Cette conférence-débat s'inscrit dans la troisième session du programme annuel des conférences de l'APSE, intitulée : "Comprendre les ressorts de la fascination gestionnaire".

Les outils de gestion ont envahi les organisations. Les technologies de l’information et de la communication se sont ajoutées à la demande de rationalisation en provenance des managers pour multiplier les applications de ces outils désormais incontournables. Il reste à évaluer avec rigueur l’impact de ces outils sur le fonctionnement des organisations et les processus de la coopération. C’est l’objectif de cette troisième session.

Entrée :
  • Membres de l'APSE : gratuit
  • Chômeurs et étudiants (- 26 ans) : 10 €
  • Non membres : 20 €
Inscription en ligne : Cliquer ici

L’APSE vous invite pour l’année universitaire 2014-2015 à un voyage qui se veut un décodage du « brouillage ambiant » à la lumière de la sociologie dans plusieurs domaines.

Ils vous invitent ainsi à sortir des idées reçues sur les questions tournant autour de "genre et organisations", de "lire le social au singulier" et de "comprendre les ressorts de la fascination gestionnaire". Suivez-les. Pour plus d'informations : 
Télécharger le programme

Optimiser sa stratégie et ses actions dans une perspective d'un rapport gagnants gagnants authentique est le seul aujourd'hui capable de nous faire sortir de la crise générale et qui est, de plus, plébiscité quasi unanimement. C'est ici un des signes forts de ce début du 21ème siècle. Je le répète en boucle depuis quasi cinq années. 

Entendons le. Et sans faire semblant, maintenant. Tentons.

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